Résumé : |
Qui sont les anti-modernes ? Non pas les conservateurs, les académiques, les frileux, les pompiers, les réactionnaires, mais les modernes à contre-cœur, malgré eux, à leur corps défendant, ceux qui avancent en regardant dans le rétroviseur, comme Sartre disait de Baudelaire. Ce livre poursuit le filon de la résistance à la modernité qui traverse toute la modernité et qui en quelque manière la définit, en la distinguant d'un modernisme naïf, zélateur du progrès. Une première partie explore quelques grands thèmes caractéristiques du courant anti-moderne aux XIXe et XXe siècles. Ces idées fixes sont au nombre de six : historique, la contre-révolution; philosophique, les anti-Lumières ; morale, le pessimisme; religieuse, le péché originel; esthétique, le sublime; et stylistique, la vitupération. Joseph de Maistre, Chateaubriand, Baudelaire, Flaubert d'un côté, de l'autre Proust, Caillois ou Cioran servent à dégager ces traits idéaux. Une seconde partie examine quelques grandes figures anti-modernes aux XIXe et XXe siècles ou, plutôt, quelques configurations anti-modernes majeures: Lacordaire et le groupe de L'Avenir autour de 1830; Léon Bloy polémiquant. avec l'antisémitisme vers 1892; Péguy et le milieu des Cahiers de la quinzaine avant 1914; Albert Thibaudet et Julien Benda, maîtres à penser de la NRF de Paulhan entre les deux guerres; Julien Gracq en délicatesse avec le surréalisme; enfin, Roland Barthes, " à l'arrière-garde de l'avant-garde ", comme il aimait se situer. Entre les thèmes et les figures, des variations apparaissent, mais les anti-modernes ont été le sel de la modernité, son revers ou son repli, sa réserve et sa ressource. Sans l’anti-moderne, le moderne courait à sa perte, car les anti modernes ont donné la liberté aux modernes, ils ont été les modernes plus la liberté. |