Résumé : |
Aristocrate et anarchiste, despote et révolutionnaire, Georges Clémenceau fut généralement considéré comme une contradiction vivante. En fait, il fut toujours passionnément fidèle aux deux principes qui le guidèrent: le culte de la patrie poussé jusqu'au sublime, le culte de la République poussé jusqu'au fanatisme. Jamais il n'oublia l'intolérable blessure causée par la défaite de1870, ni les leçons de son père, fervent de Robespierre et des "grands ancêtres" de la Convention.
Pendant un demi siècle, Clémenceau exerça une influence considérable sur la vie politique française et sur le destin du monde; il combattit pour ses idées avec l'énergie féroce, la sauvage indépendance qui lui valurent d'être surnommé le Tigre. Il eut la joie, après des luttes homériques, de voir triompher la République de ses rêves, il connut, au soir de son existence, la gloire suprême de sauver son pays au bord de l'abîme, de lui rendre une place privilégiée dans le concert des nations.L'homme politique exécré, vilipendé, objet des accusations les plus infamantes, devint alors le Père la Victoire, symbole de la renaissance de son pays. Il ne manqua pas à son auréole cette ingratitude réservée par les peuples à leurs plus grands serviteurs.
Clémenceau a connu la haine et l'idolâtrie, il a eu sa légende noire et sa légende épique. Il en fut de même pour Philippe le Bel, pour Louis XI, pour Henri IV, pour Richelieu, pour Louis XIV , pour Napoléon, ces bâtisseurs de l'histoire de France.
Philippe Erlanger, cette fois, a choisi son sujet tout près de notre époque. Sa lucidité, son talent aigu, son extraordinaire don d'évocation nous rendent claire une longue suite de malentendus et de violences historiques. Il y a plus, il a su nous rendre sensible le duel prodigieux que Clémenceau mena toute sa vie contre la fatalité. Si bien qu'ayant lu cette épopée, le lecteur en sort bouleversé comme au sortir d'une tragédie grecque. |